Chapitre 2 : une vie à reconstituer (suite)
Ce savoir, Matthias s’était lui-même refusé d’y accéder pour oublier le passé gênant, mais tout autour de lui aussi, on avait pris le soin de l’enfouir, de peur de réveiller des démons pas tout à fait éteints.
Il faut dire que cette dépression n’en était pas une. Il s’agissait plutôt d’une maladie. Profonde. Caractérisée par des symptômes graves, faite d’une certaine absence de discernement (pas complète, nous y reviendrons), de bouffées délirantes nécessitant de fait des hospitalisations répétées durant six ans.
Dangereux pour lui-même et pour les autres , il nageait en eaux troubles dans des bas-fonds où le temps s’était arrêté. A cette maladie soi-disant diagnostiquée (Matthias ne savait pas le nom de la maladie dont il souffrait), un traitement lourd avait été administré et cette « mort » était aussi due à ses effets.
Bien sûr, quand il était en rémission, Matthias ne voulait pas revenir sur ce qu’il avait vécu mais, en même temps, il avait la certitude de se rappeler de tout, même les épisodes les plus graves où pourtant il n’était plus lui.
Ses propres souvenirs n’étaient pas les mêmes de son entourage qui avait assisté de près ou de loin à cette plongée vers l’abîme. Coupé du monde, isolé, abandonné à ce triste sort, le jeune homme avait accumulé un handicap pour la suite. Après la crise, l’environnement familial et social demeurait le même. Matthias avait fait du surplace. Son corps était le même, son état général, y compris mental, s’était rétabli. Mais un décalage évident existait. (à suivre…)
(02/08/2019)